UNE TRAGÉDIE PASSIONNELLE
DIFFÉRENCE ENTRE LA RÉALITÉ ET LA FICTION
UNE TRAGÉDIE PASSIONNELLE
Transcription faite film du premier livre de la romancière allemande Daniela Krien : un jour, nous nous dirons tout, cette littérature contemporaine allemande de très haute qualité, comparable à Marlen Haushofer, aussi faite film, Le mur invisible, bouleverse par la force du langage choisi, (et nous n’avons que sa traduction, une autre chose serait de le lire en allemand) et l’idée très audacieuse de le faire cinéma, sa réussite est complète, aussi bien du point de vue purement visuel que par l’adaptation faite du roman parmi des dialogues choisis, elle complète l’image avec le contenu résumé des mots, les mots essentiels qui dans tous les dialogues sont les responsables du crescendo tragique.
Dès que nous approchons le cinéma allemand nous savons d’avance qu’il sera sur un socle où ne manqueront jamais des références sérieuses en matière de musique classique, littérature et le contenu toujours sérieux de cette production fera un contraste indéniable avec la décadente anti-création cinématographique mondiale où échappent de la laideur les pays nordiques. Il n’est pas erroné de lire les critiques d’une part du livre et d’autre part des critiques de cinéma. Je regrette nonobstant d’avoir lu les critiques françaises.
Elles sont innommables et je ne citerai aucun pour ne pas écrire leurs noms, ils ne méritent même pas une critique négative. Je suis allée chercher les critiques allemandes du livre, ils déplorent quelques aspects de la langue avec certaines des défaillances, je ne peux pas être juge sans connaissance de l’allemand, je crains qu’ il y ait aussi une erreur, d’aucuns lui font l’éloge au sujet de présenter un sujet archaïque uni à une présentation « lumineuse ».
En revanche la critique du film a été enrichissante, et nous nous confrontons, encore au XXI siècle, face à une incompréhensible mentalité équivoque et puritaine. Des revues allemandes de prestige et des critiques qui ne peuvent pas être accusés de manquer de culture, en dépit des éloges, leur réprobation persiste vis-à-vis des scènes et du contenu ; elles sont toutes décevantes. J’ai opté aussi pour les passer sous silence.
Voici ce que je crois :
La cinéaste et autrice tout comme les acteurs sont de premier ordre.
Le choix du couple d’acteurs a été singulier, des acteurs qui se surpassent.
La cinéaste Emily Atef et Daniela Krien ont réalisé en collaboration un chef-d’œuvre cinématographique ; elles ont été capables de réaliser la plus ardue des œuvres de cinéma contemporain prenant comme attache une œuvre littéraire.
Les acteurs dans cette mise en scène visuelle et auditive font le prodige de créer par le moyen de leur travail d’acteurs, la mise en œuvre factuelle une des plus difficiles de transcriptions cinématographiques : mettre dans une réalité fictionnelle les affres d’une passion amoureuse dont bien peu de gens sont à même de comprendre, il faut bien des qualités mentales pour appréhender naturellement des œuvres qui présentent les énigmes passionnelles avec la simplicité humaine faite art.
Bon nombre d’éléments aussi bien du contenu que de la forme sont
semblables au roman de D.H. Lawrence, L’Amant de lady Chatterley, quand bien même les enjeux existentiels sont très différents.
L’intromission des textes poétiques de Georg Trakl sont d’une intelligence esthétique totale, ces ajouts des lectures, des vers choisis, donnent le rythme nécessaire à l’action formant un tout harmonieux.
LA LENTEUR
Le socle sur lequel se déroule l’action au ralenti est la configuration tragique de la naissance d’une passion amoureuse.
C’est cette lenteur recherchée volontairement a été source de critique, mais elle était nécessaire ; ceux qui furent incapables de comprendre que la transcription des mouvements de l’esprit ne peuvent se faire cinéma violant de fond en comble les principes de l’art cinématographique, s’ils veulent de la vitesse, qui déclinent la critique de cinéma existentiel.
LES PERSONNAGES
Dans un contexte politique en mutation très complexe, le passé récent, le passé hérité s’introduit chez les personnages, l’histoire du pays ne peut ne pas entrer comme une toile de fond permanente qui bouscule la configuration mentale de chacun d’entre eux et qui compromet indubitablement cet intérieur abîmé et menaçant à tout moment leurs comportements dans un présent instable et difficile, ils sont tous avec des degrés différents, concernés par leur passé et enraciné au plus profond de leurs esprits.
ARTICULATIONS
C’est dans un contrepoint permanent que les couple doit vivre cette passion exigeante d’être vécue ; mais le contraste non d’âge, mais de configuration mentale et de capacité d’expérience de vie que l’héros masculin possède et que l’héroïne romanesque fait preuve d’ignorer en dépit de ces mots, son action se dérobe et vacille, le tragique de ce déséquilibre amoureux prépare un conflit sans issue annonçant la tragédie finale. C’est lui qui a raison.
Dans leur dernier dialogue, nous sommes alertés… Le climax n’est pas dans l’horreur de la tragédie de la fin, mais dans ce dernier face à face violent et débordant de vérité.
Cette passion exigeait le « ici et maintenant ». La phrase de la fin qu’il a prononcé ne fut qu’un présage de mort :
« Donne-toi une nuit de réflexion »
Et si, et si…
D’aucuns pourront critiquer, il faut de l’expérience de vie pour devenir critique de cinéma et de littérature, c’est un cinéma sérieux, si c’est dérangeant pour vous, si vous croyez que la fin n’aurait pas dû être faite ainsi, alors écrivez vous-même un autre roman !
Il faut s’abstenir de critiquer ce qui n’existe point.
Nous avons devant nous une merveille faite acte avec des prises de vue somptueuses qui vont de pair avec l’action, les dialogues, les silences et les regards. Tout ce contexte cinématographique révèle une maîtrise parfaite de la technique, ces deux artistes qui créèrent ce film ont su toutes les deux, appliquer les lois de tout art ; « augmenter, diminuer et supprimer ».
Quelle réussite !
C’est un phénomène de grandeur visuelle, un génie esthétique est né avec ce film doté d’une mise en scène parfaite qui a su avec une maîtrise des éléments techniques propres au cinéma, si différents des littéraires, mettre en scène les tréfonds énigmatiques d’une passion amoureuse.
Carmen Florence Gazmuri Cherniak
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